Face aux pressions internationales grandissantes, le gouvernement de la République Démocratique du Congo reste inflexible : il n’y aura pas de pourparlers directs avec le groupe rebelle M23. Malgré les avancées militaires de ce dernier dans l’est du pays, Kinshasa privilégie un dialogue avec le Rwanda, qu’il accuse d’être le véritable instigateur du conflit.
Récemment, le Royaume-Uni a rejoint les appels en faveur d’un « dialogue inclusif » pour tenter d’apaiser la crise. Toutefois, dans un entretien avec la BBC, la Première ministre Judith Suminwa Tuluka a réaffirmé la position du gouvernement congolais : « Le véritable agresseur de l’intégrité territoriale et de la souveraineté de la RDC, c’est le Rwanda ».
Un conflit meurtrier et une crise humanitaire
Depuis l’intensification des combats en janvier, les autorités congolaises estiment que plus de 8 500 personnes ont perdu la vie, tandis que des centaines de milliers d’habitants ont été contraints de fuir leur foyer. Des experts de l’ONU et plusieurs observateurs accusent Kigali de soutenir activement le M23, en fournissant des hommes et du matériel militaire.
Un rapport de l’ONU publié l’an dernier affirme que 3 000 à 4 000 soldats rwandais auraient franchi la frontière pour appuyer le mouvement rebelle. Cette situation a conduit à une impasse dans les pourparlers de paix sous médiation angolaise en décembre dernier, le Rwanda exigeant une négociation directe entre Kinshasa et le M23.
L’ascension du M23 et la réaction internationale
Début 2024, les rebelles ont intensifié leur avancée, s’emparant successivement de Goma et Bukavu, des villes stratégiques de l’est du pays. Face à cette escalade, les dirigeants des blocs d’Afrique de l’Est et d’Afrique australe ont appelé à un cessez-le-feu et au retrait immédiat des « forces armées étrangères non invitées » du territoire congolais.
Interrogé sur la présence de troupes rwandaises en RDC, le président Paul Kagame a éludé la question lors d’une interview sur CNN, déclarant : « Je ne sais pas ». Une réponse qui a suscité de vives réactions et renforcé les suspicions sur l’implication de Kigali dans le conflit.
Pressions diplomatiques et sanctions économiques
Sous l’impulsion des États-Unis, l’Europe et le Royaume-Uni ont commencé à durcir le ton face au Rwanda. Washington a imposé des sanctions ciblées contre des responsables rwandais, dont le ministre James Kabarebe, tandis que la Commission européenne a suspendu certaines de ses coopérations en matière de défense avec Kigali.
Le gouvernement congolais salue ces mesures. « L’exploitation illégale de nos ressources est l’une des causes majeures du conflit », a rappelé la Première ministre Suminwa Tuluka, pointant du doigt les accusations d’exploitation illicite des minerais congolais par le Rwanda.
Londres, de son côté, a menacé de suspendre son aide au Rwanda, sauf pour les programmes destinés aux populations les plus vulnérables. Une décision vivement critiquée par Kigali, qui la qualifie de « punitive » et refuse de compromettre sa « sécurité nationale ».
Un espoir de résolution ?
Alors que la pression diplomatique s’intensifie, la Première ministre congolaise reste catégorique : la solution au conflit passe par le retrait immédiat des troupes rwandaises et l’arrêt des exactions du M23 contre les populations congolaises.
De son côté, Kigali continue d’accuser Kinshasa de collusion avec les rebelles des Forces Démocratiques de Libération du Rwanda (FDLR), un groupe armé dont certains membres sont impliqués dans le génocide de 1994. Une accusation rejetée par Kinshasa, qui assure être engagé dans un processus de « neutralisation » des groupes armés présents sur son territoire.
Dans ce climat tendu, l’issue du conflit reste incertaine, mais une chose est sûre : la RDC refuse toute concession qui pourrait légitimer le M23 et ses actions armées.