Les funérailles de l’artiste engagé Delphin Katembo Vinywasiki, alias Delcat Idengo, ont été marquées par des heurts meurtriers ce mardi 25 mars 2025 à Beni, dans la province du Nord-Kivu. Deux personnes ont été tuées par balles et plusieurs autres blessées lors d’affrontements entre les forces de l’ordre et des militants.
Un cortège funèbre sous tension
Alors qu’une foule massive accompagnait le corps de l’artiste vers le cimetière de Kimbangu, des tensions ont éclaté. Selon des témoins, les manifestants ont exprimé leur hostilité envers la présence policière, accusant les autorités d’être responsables de la mort de Delcat Idengo. Celui-ci avait été arrêté, emprisonné à Goma, et retrouvé mort le 13 février dernier après une évasion présumée lors d’une attaque rebelle.
Face aux jets de projectiles des manifestants, les forces de l’ordre ont répondu par des tirs de sommation, entraînant la mort de deux personnes. Parmi les victimes figure une femme qui se trouvait à son lieu de travail près du cimetière. Une autre victime, originaire de Butembo, a également succombé à ses blessures.
Témoignages et indignation
« Il y a deux victimes, dont un homme venu de Butembo et une femme tuée par balle », a témoigné un jeune ayant accompagné le corps de la victime à l’hôpital. Des sources hospitalières ont confirmé ces décès, ainsi que la prise en charge de plusieurs blessés.
Shabani Loswire, militant du mouvement citoyen Lutte pour le Changement (LUCHA), a dénoncé l’usage disproportionné de la force par les forces de l’ordre. « Nous déplorons la mort de deux civils et la répression violente des autorités », a-t-il déclaré.
Un artiste engagé et controversé
Delcat Idengo était connu pour ses chansons à caractère politique, dénonçant l’insécurité dans l’Est de la RDC et critiquant ouvertement les autorités. Arrêté à plusieurs reprises, il avait été condamné à 10 ans de prison avant d’être libéré en décembre 2023 sous pression populaire. Toutefois, sa détermination à poursuivre son engagement militant lui a valu une nouvelle arrestation en 2024.
Après une évasion spectaculaire de la prison de Munzenze, à la veille de l’entrée des rebelles du M23 à Goma, Delcat Idengo avait repris sa plume pour dénoncer la présence des groupes armés. Sa dernière chanson, intitulée « Bunduki » (« Arme » en swahili), critiquait vivement les factions rebelles et la gestion gouvernementale.
Une série de tragédies
Depuis l’arrivée du corps de Delcat Idengo à Beni, cinq civils ont trouvé la mort dans des incidents liés à ses funérailles. Trois personnes ont péri dans un accident de la route lors du retour du corps depuis la cité d’Oïcha. La cérémonie d’inhumation a finalement eu lieu sous haute tension et sous les regards vigilants des forces de l’ordre.
Malgré les violences, les acteurs socio-politiques locaux ont appelé la population à perpétuer le combat de Delcat Idengo pour la bonne gouvernance et la justice sociale. « Poursuivre la lutte qu’il a menée est la meilleure façon d’honorer sa mémoire », a affirmé un jeune militant de Beni.
La situation reste tendue dans la région, où les populations exigent des réponses sur les circonstances exactes de la mort de l’artiste et réclament justice.